Postulat n° 5 - Rapport final du Conseil communal

Résumé du postulat

Le taux de recyclage des différents déchets en Suisse tels que le verre, le PET et l’aluminium est très bon. Cependant, le recyclage des briques à boissons en Suisse est quasi inexistant, à l’instar de l’ensemble de l’Union Européenne où le recyclage atteint près de 50%. Suite à ce constat, M. Pascal Wicht demande au Conseil communal d’étudier la possibilité de collecter et de recycler les briques à boissons.

Réponse du Conseil communal

Préambule

Mettre sur place une nouvelle filière de recyclage de déchets n’est pas une problématique en soi. Il faut cependant s’assurer qu’elle remplisse différents critères:

-           une filière d’élimination pérenne doit exister

-           l’écobilan doit être positif

-           une faisabilité technique doit être possible

-           un moyen de financer les coûts de collecte doit exister

Le fait de recycler de nouvelles matières nécessite d’instaurer de nouvelles habitudes auprès de la population, d’informer et d’instruire. Une fois le système en place, il faut également tenir compte du fait qu’il est très difficile de revenir en arrière si le recyclage devait être stoppé.

Il est nécessaire de rappeler l’expérience de la récupération des plastiques dans les points de collecte de la Ville suite à l’ouverture de l’usine Polymera à Payerne, laquelle n’a pas duré longtemps. Suite à cela, il a été très compliqué d’expliquer à la population les raisons faisant qu’il n’était, du jour au lendemain, plus possible de collecter ce type de déchets. Cette sorte de déchets se retrouve toujours et encore dans certains points de récolte sous forme de littering.

1.         Existence d’une filière d’élimination pérenne

Le repreneur régional de briques à boissons le plus proche de la Ville est pour le moment l’entreprise Haldimann SA, basée à Morat. La Ville de Lausanne travaille avec l’entreprise Retripa à Bussigny. Depuis ces emplacements, la direction prise par les bennes de briques n’est pas claire.

L’usine Model AG, située à Weinfelden (TG), aurait la capacité de recycler les 20’000 tonnes de briques produites en Suisse (selon https://www.letemps.ch/economie/suisse-rechigne-recycler-berlingots). Néanmoins, le site internet de l’entreprise ne parle aucunement du recyclage de briques à boissons, il semblerait que cette usine aurait fermé car elle tournait en sous-capacité.

A ce jour, l’usine Model n’a pas répondu aux questions de la Ville.

Le site: https://www.info.briquesaboisson.ch/post/palurec-nouvelle-usine présente la création d’une nouvelle usine en Allemagne dans la région de Cologne. La société Palurec Sàrl a été fondée en décembre 2017. L’unique actionnaire est la "Fachverband Kartonverpackungen für flüssige Nahrungsmittel" (FKN), association pour les emballages en carton pour les produits alimentaires liquides, dont le siège est à Berlin. L’association regroupe les sociétés Elopak Sàrl, SIG Combibloc Sàrl et Tetra Pak Sàrl, qui ont investi ensemble huit millions d’euros dans cette usine de 18 000 tonnes.

Il ressort donc qu’aucune usine n’existe pour le moment en Suisse et que la matière première collectée à Fribourg devra fort probablement être transportée en Allemagne.

2.         Ecobilan du recyclage des briques à boissons

En 2014, l’Office fédéral de l’Environnement (OFEV) a mandaté Carbotech pour élaborer un écobilan des emballages de boissons[1] . En 2016, cette entreprise a également établi un écobilan des briques à boissons[2].

Concernant le cycle de vie global, les écobilans précités indiquent qu’une grande partie de l’impact environnemental de ces emballages est due à leur fabrication. L’étude commandée par l’OFEV informe qu’un taux de recyclage de 70 % permettrait de réduire les impacts sur l’environnement d’un quart, voire d’une moitié.

De plus, il ressort également que le transport des matériaux en vue d’un recyclage, même en direction de l’Allemagne, ne représente qu’une faible part des émissions de CO2 générées par la durée de vie d’une brique à boissons.

3.         Faisabilité technique: mise en place, organisation du recyclage et qualité du matériau à recycler

Le principal défi dans le recyclage des matières est de pouvoir garantir la qualité du produit remis au recycleur.

L’expérience des autres communes ayant déjà mis en place la collecte des briques à boissons relève la difficulté à maintenir l’hygiène des containers. En effet, les briques de lait qui fermentent dégagent une odeur nauséabonde et les jus sucrés attirent les insectes. Par exemple, la municipalité de Payerne doit déplacer ses contenants en été à cause de leur odeur fortement désagréable sur tout le site de la déchetterie.

Au vu de ce qui précède, il est donc proposé d’installer la collecte des briques à boissons de manière progressive, sur une durée d’environ 2 ans.

-           1ère étape: mise en place d’un contenant fermé et étanche sur le site des Neigles et information à la population. Cela aura pour avantage de pouvoir passer une information ciblée, de contrôler la qualité et de faire, pour la Ville, sa propre expérience en terme de gestion des odeurs et jus résiduels.

-           2ème étape: recherche d’un contenant adapté, pouvant être installé dans les points de collecte. Il est fort probable que celui-ci soit petit (conteneur de 120lt), toujours pour les mêmes raisons d’hygiène.

-           3ème étape: mise en place progressive des containers dans les points de collecte en ville. L’avantage de cette façon de faire sera le suivi progressif de la qualité et une meilleure communication. Si la qualité ne pouvait pas être garantie, un retour en arrière serait ainsi à envisager.

La logistique des différentes phases impliquera l’installation d’une benne de stockage sur le site des Neigles. Les divers petits contenants y seront vidés avant d’être lavés fréquemment. L’échange des containers pleins pourra s’intégrer dans les tournées de vidange des points de collecte. Le lavage régulier sera une tâche supplémentaire qui devra être faite plusieurs fois par semaine durant la belle saison. La benne de stockage nécessitera également de fréquents transports et une vidange de une à deux fois par semaine.

4.         Coûts et financement du recyclage des briques à boisson

De manière générale

Selon SwissRecycling, la raison pour laquelle il n'existe actuellement qu'un nombre limité de points de collecte est le manque de financement. Ce qui fait défaut encore aujourd'hui est une approche globale qui s'appliquerait sur l'ensemble du territoire suisse et qui impliquerait toutes les parties prenantes. La Suisse ne prévoit pas non plus de taxe sur les emballages et les matériaux d’emballage utilisés; seules les bouteilles en verre sont soumises à une taxe d’élimination anticipée (TEA). Pour les bouteilles en PET et les canettes en aluminium, une contribution de recyclage anticipée (CRA) est comprise dans le prix de vente de chaque pièce. Elle permet de financer notamment la mise en place et l'entretien de la logistique de collecte. Le même principe pourrait être appliqué aux briques de boissons, ce qui n’est actuellement pas le cas.

De manière analogue aux autres emballages de boissons (PET, alu et verre), il serait souhaitable que le coût de remise des briques de boisson soit gratuit pour les habitants. Toutefois, en l’absence d’un financement anticipé (TEA ou CRA), le coût de la collecte et de l’élimination des briques de boissons doit être prélevé sur le budget communal de la gestion des déchets urbains. En conséquence, chaque nouveau déchet qui est sorti du sac taxé diminue le financement des déchets tout en modifiant les charges d’élimination.

En détail

Sur la base des analyses statistiques entre 2018 et 2022 du contenu des sacs poubelles de la Ville, il ressort que les briques à boissons pourraient représenter 1% du tonnage global des déchets ménagers. Ce qui donnerait 760 tonnes. Le prix de reprise livré chez Haldimann AG est de CHF 60.-/tonne.

Bennes et conteneurs:                                                              CHF 7'000.-

Estimation des coûts d’élimination chez le recycleur:               CHF 45'000.-

Estimation des coûts de transport et nettoyage:                        impossible à chiffrer

Remarques

  • Toutes les estimations de ce chapitre sont à prendre avec une grande prudence.
  • Une économie devrait être réalisée sur le compte d’incinération SAIDEF. Celle-ci se monterait à CHF 123'000.-, ce qui ferait pencher la balance financière du côté positif.
  • Les coûts de nettoyage et de transports seront noyés dans la masse des travaux liés à la gestion des points de collecte. Les surcoûts engendrés sont impossibles à chiffrer.
  • Le fait d’augmenter la part des matières recyclées et non incinérées devrait faire diminuer le nombre de sacs taxés vendu. Le manque à gagner ainsi que l’impact global sur le budget de gestion des déchets et des taxes sont impossibles à estimer.

Au vu de ce qui précède, il est proposé d’intégrer les coûts d’équipement, de collecte, de transport et d’élimination dans le budget de fonctionnement des déchets.

5.         Conclusion

L’impact environnemental global des briques à boissons peut être amélioré, ceci au moyen d’une collecte séparée, pour autant que celle-ci puisse atteindre une qualité élevée avec un haut taux de collecte et qu’elle soit techniquement faisable et proportionnée.

Cependant, la meilleure mesure pour réduire l’impact des emballages de boissons sur l’environnement serait de renoncer si possible aux emballages, en particulier à usage unique. Dans le cadre de l’objectif durable n° 12 "Établir des modes de consommation et de production durables", la Ville de Fribourg s’engage depuis plusieurs années pour une alimentation plus responsable, concernant tant la génération de déchets à usage unique que la promotion d’un approvisionnement local, bio et équitable.

Par exemple, une des mesures mise en place par la Ville pour diminuer la production de vaisselle à usage unique est l’action "Amène ton tup", menée de 2018 à 2020.

Dans l’optique d’améliorer le taux de matières recyclées plutôt qu’incinérées, le Conseil Communal est d’avis que la mise en place de la collecte des briques à boissons peut se faire progressivement sur un délai de deux ans. En cas de problèmes, un retour en arrière serait ainsi toujours possible et les expériences seront dans tous les cas intégrées dans les réflexions en cours sur la stratégie de gestion du nouveau règlement des déchets.

Le postulat n° 5 est ainsi liquidé.

[1] https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/36447.pdf

[2] https://www.info.briquesaboisson.ch/_files/ugd/391c46_1f2487f97d7e4fac84fb2c8e8f8719fb.pdf